LA LONGUE HISTOIRE D'UNE BOISSON SALUTAIRE

La consommation du lait de jument ne date pas d’hier. Auteurs, médecins et poètes de la Grèce antique relatent déjà son utilisation. Homère décrit dans l’Iliade les «trayeurs de chevaux». Aristote et Hippocrate reconnaissent certaines de ses vertus et le recommandent pour soigner empoisonnements ou douleurs articulaires.

Hérodote, lors d’un voyage en Asie, qualifia le lait de jument fermenté de «nourrissant, fortifiant et stimulant». Mais c’est sans doute en Asie que le lait de jument fut le plus consommé. Les peuples nomades d’Asie centrale, qui ne se nourrissaient pas, ou peu, de crudités, trouvaient là une source en vitamines.

Sous la Russie tsariste, on tenta d’interdire la traite des juments aux cosaques afin de laisser tout le lait aux seuls poulains. Le résultat fut désastreux pour nombre de cosaques qui tombèrent malades par manque de vitamines. La mesure fut abrogée quelques mois plus tard.

Lait de jument mongolie



C’est sous forme de lait fermenté plus ou moins alcoolisé que le lait était, et est toujours, le plus souvent consommé en Europe de l’Est ou en Asie; c’est le fameux koumis en Asie centrale ou l’ayrag en Mongolie. Koumis vient du nom de la peuplade d’Eurasie, les Kumanes, qui l’auraient conçu. C’est une boisson issue d’une double fermentation lactique et alcoolique.Elle est acidulée, légèrement pétillante, et titre généralement de 1 à 4 degrés d’alcool. Elle a un goût, disons… un peu particulier. Il n’empêche qu’elle est toujours très consommée et appréciée en Russie et dans les pays de l’Est. Le premier sanatorium utilisant du lait de jument fut ouvert en Russie en 1858.

Au début du siècle, Tchekhov, en croisière sur la Volga pendant sa lune de miel, suivit une cure de koumis pour lutter contre sa tuberculose(maladie dont il mourut 3 ans plus tard).

Aujourd’hui, sur le territoire de l’ex-Union Soviétique, on élèverait plus de 200.000 juments pour la production de lait. Certaines sources indiquent qu’au Kazakhstan, on produirait près de 50.000 tonnes de koumis par an.

En Europe Occidentale, le phénomène lait de jument est plus récent. C’est après la Seconde Guerre Mondiale que sa consommation se propage à l’Ouest, en Allemagne et en Autriche. Le Docteur R. Storch, prisonnier de l’armée soviétique, impressionné par les succès thérapeutiques des médecins russes, l’introduisit dès 1945 en Allemagne.

En France, on en consommait dans nos campagnes jusque dans les années 50. Mais le renouveau de la production ne date que d’une quinzaine d’années.